✾ Vega.

Tu la fille du milieu. Née quelques années après l’ainée, quelques années avant le cadet, tu as cette place, toute particulière, Vega. Tu n’es pas la première, alors, ce n’est pas avec toi que tes parents auront fait leurs toutes premières expériences en tant que parents. Il n’y a pour ainsi dire jamais eu d’incompréhension entre eux et toi, ils étaient préparés à tes questions, aux difficultés, ils savaient y faire, tu t’es sentie choyée, aimée, et comprise, tu n’as jamais eu le sentiment de révolte qu’à pu ressentir ta sœur. Et puis, tu n’es pas non plus la dernière. Tu n’es pas celle sur laquelle tes parents veillent le plus, tu n’es pas celle qui ferme la fratrie, et qui clos le chapitre de la parentalité pour tes géniteurs. Tu as le beau rôle, voilà ce que tu penses. La place facile, et à la fois, tu es aussi, sans doute, celle dont on s’est le moins préoccupée. Heureusement, en ce qui te concernes, tu as su très tôt voler de tes propres ailes, et ça ne t’as jamais dérangée.

Il n’y a rien de notable, ou d’important à raconter sur toi. Pas de difficultés particulières. Rien. Tu as été une enfant stable, normale. Une enfant qui a fait ses premiers pas à onze mois, qui a fait ses dents dans l’ordre, qui n’a jamais eu d’avance sur les autres, mais qui n’a jamais eu de retard sur rien non plus. Une gamine bosseuse, mais pas trop, avec de bons résultats à l’école, mais pas excellents non plus. En fait, Vega, tu es tout bêtement, et simplement, une fille banale.

Il n’y a qu’une histoire que l’on se doit de raconter, sur toi, parce qu’elle a marqué le début d’un chapitre tout particulier dans ton existence. Un petit quelque chose, qui a fait de toi une fille pas si banale, finalement. Tu avais six ans, quand c’est arrivé, une balade à la campagne, dans la ferme d’un couple d’amis de tes parents, tu t’es éloignée, à la poursuite de cet oiseau, parce qu’il était joli, et puis, tu t’es baladée, tu as jouée, et tu es tombée dans ce puit. Tu es tombée de haut, ton n’as eu qu’un poignet cassé, et c’est un miracle. Néanmoins, tu es restée là-dedans durant trois heures … Oui. Trois. Avant qu’on ne te retrouve enfin. Non pas en larmes. Mais prostrée. Enfermée dans ta peur. Des cauchemars, tu en as fais jusqu’à tes onze ans, et en parallèle, pour y échapper, tu développais cette capacité. Quelle ne fut pas la surprise de tes parents lorsqu’un jour, tu t’es endormie dans les bras de ton père à l’étage, et que dans le même temps, tu demandais un bonbon à ta mère en bas. Tu as fait ce coup-là plusieurs fois, quand ils ont vraiment compris, ils ont paniqué, et puis, ils t’ont ordonné de ne plus faire ça. Tu as dit que tu obéirais. Tu as continué à l’utiliser.

Et tu vois, on s’attends peut-être à ce que ce changement dans ta vie ait provoqué des malheurs … Mais non. Ton don n’a jamais impacté ta vie, ton existence, tes amitiés, ou encore tes relations. Tu as toujours su le cacher, il ne s’est jamais manifesté sans que tu ne le contrôles, tu ne l’as jamais utilisé devant quelqu’un qui n’était pas de ta famille. Tu t’es tenue à cette simple règle, ça a toujours bien fonctionné.

C’est vers la médecine que tu t’es orientée, à l’Université. Tu voulais devenir infirmière … tu as échouée. Trop moyenne. Pas assez parfaite. Du coup, tu as changé de voie, sans même un regret, sans t’en offusquer, rien. Tu as trouvé un autre moyen de venir en aide aux autres, et vraiment, ça te plaisait, ça te plaisait beaucoup.

C’est peu après avoir dénicher ton premier emploi que tu as rencontré Will. Un bel homme. Tu lui plaisais beaucoup, physiquement, surtout, tu aurais dû t’en douter, mais des relations amoureuses, tu en avais eu trop peu. Il t’a fait du charme, au départ, ça te semblait trop, finalement, tu t’es laissé convaincre, séduire, et tu as finis par l’épouser, après deux années de relation. Le truc, tu vois, c’est que tu n’es pas une fille naïve, tu n’es pas faible d’esprit, non plus, pourtant, il a réussi à te convaincre. Tu as quitté ton emploi, tu l’as suivie à Charney, et voilà une année entière que tu es là.

Depuis un mois, maintenant, ce bien trop grand appartement est ta prison dorée. Tu as l’argent, parce que tu as un bon contrat de mariage, et que visiblement, il en a assez pour te laisser dépenser. Mais c’est tout. Tu sais qui il est. Tu sais dans quoi il trempe. Tu t’es rendu compte que tu n’avais plus pour lui que du dégoût, et pourtant, tu restes. Parce que tu as peur. Parce que, la mafia, c’est quelque chose. Parce que, tu crains pour ta vie, mais aussi celle de tes proches. Tu aimerais pourtant fuir. Tu aimerais t’en défaire … tu aimerais … Mais tu as découvert que, non, vraiment, l’argent ne fait pas le bonheur, parce que, c’est tout ce que tu as, et tu es bien malheureuse, aujourd’hui.