l'appel du café noir. (micah)

Tu es satisfait, et à la fois, tu ne parviens pas à l'être complètement. Tu te sens rassuré, en un sens, mais de l'autre tu te sens fautif, responsable, alors même que tu n'as rien à voir dans l'état actuel du mariage de Micah. Quand Sullivan lui a passé la bague au doigt, il a fallu que tu te raisonnes et que tu te fasses la promesse de ne jamais rien faire pour abîmer ce mariage, tu n'es jamais sorti de ton rôle de meilleur ami, tu n'as jamais remis le sujet de la relation que vous auriez pu avoir, tous les deux, si vos parents n'avaient pas décider avant vous de se mettre ensemble … Rien. Absolument rien. Et pourtant, aujourd'hui, ce mariage bat sérieusement de l'aile. Sullivan fait n'importe quoi, Micah en soufre, et toi tu te ne sais même pas comment te positionner parce qu'une part de toi ne peut s'empêcher d'entrevoir une lueur au milieu de leur chaos, quand ta cervelle te rappelles que tu es censé n'être qu'une épaule solide, pour elle.

Toutefois, tu continues de penser que tu dois protéger Micah. Tu ne sais pas trop à quoi joue son mari, mais tu vois bien dans quel état cette situation peut la mettre alors, tu as insisté pour l'éloigner de tout ça. Tant pis pour la position délicate dans laquelle tu te places, tant pis pour ce que Sullivan pourrait avoir à en dire. Tant pis. Elle a besoin d'air, et tu es tout à fait disposé à lui en offrir en la laissant venir s'installer à la maison.
Tu as préparé une chambre, pour elle, l'ancienne chambre de ta mère a depuis longtemps été vidée de toutes ses affaires, il y a de place, Micah pourra s'installer et s'étaler autant qu'elle le souhaite ici, que ce soit pour vivre ou pour travailler le temps que les choses se tassent, s'arrangent.

La veille, lorsque vous êtes tous les deux rentrés chez elle et que vous êtes tombés sur Sullivan, les choses ne sont pas réellement bien passées alors, tu as simplement tirer ta meilleure amie hors de la maison, tu l'as mise dans ta voiture en empêchant le pompier de l'empêcher, et puis tu l'as ramenée ici. Elle a dormi dans la chambre de Wynona, pour la nuit.
Ce matin, tu as quitté la maison dès les premiers rayons de soleil, tu es allé récupérer le petit déjeuner dans une petite boulangerie au coin de la rue et alors que tu rentres tout juste, déposant les sachets, le café, et les jus d'orange pressés sur le comptoir, tu entends des pas dans l'escalier. « Pile à l'heure. C'est l'odeur du café qui t'a attirée ? »

La soirée de la veille a tournée au cauchemar. Ce qui aurait dû être une soirée tranquille avec mon meilleur ami, c'est transformé en pugilat entre Sullivan et moi. Jamais nous ne nous sommes dit autant d'horreur. Mais une part de moi me souffle que certaines de ces choses étaient là, enfouis depuis trop longtemps. Elles s'étaient enracinés en nous, entre nous, jusqu'à devenir un poison qui pourrissait notre relation.

Voilà que je deviens même poète.

J'avais laissé Jeremiah m'entrainé vers l'extérieur, me faire entrer dans sa voiture. Je n'avais même pas eu le courage de tourner la tête vers Sullivan, qui m'appelait, sur le pas de notre porte.

Jerem m'a laissé l'ancienne chambre de Jolene. Une pièce que je connais, qui a su m'apporter un peu de réconfort. Pourtant, le sommeil a été agité, difficile à trouver. Je me suis réveillée plusieurs fois, agitée. Mais je n'ai pas pleuré. Pas une seule fois. Pas encore. Peut-être que cela viendra.

J'ai quitté le lit une fois, alors que le soleil n'était pas encore levé. J'ai lentement avancé jusqu'à la porte entrouverte de Jeremiah. Il dormait paisiblement. L'espace d'un instant, je fus tenté de me glisser à ses côtés. De retrouver le réconfort de sa présence, comme au moment du décès de ma mère. Quand je n'arrêtais de pleurer qu'en sa présence. Mais si c'était déjà moyen quand j'étais adolescente, ça l'est encore plus maintenant que nous sommes adultes. Meilleurs amis ou pas, une femme ne se glisse pas dans le lit d'un homme de cette manière.

J'ai donc regagné mon lit, et finit par retrouver les bras de Morphée, de très très longues minutes après. J'ai rouvert les yeux au lever du soleil. Mais incapable de me lever, j'ai fini par rester là, tourner vers la fenêtre, à fixer le ciel. Un végétatif qui me fait horreur. C'est l'odeur de café qui finit par me pousser à me lever. Je tire la couette et me redresse. J'attrape la vieille robe de chambre de Jo par-dessus un vieux pyjama que j'ai pris dans un tiroir.

Je descend l'escalier et un léger sourire étire mes lèvres. « Comment résister à l'appel de la caféine ? » Mais il n'y a pas que du café. Sur le comptoir je découvre du jus d'orange frais et des viennoiseries. Il s'est levé et a préparé le petit déjeuner. Pour moi. Je suis incapable de me souvenir de la dernière fois qu'on a pris la peine de me préparer mon petit déjeuner. Cela me rappelle aussi ma vaine tentative de sauver mon couple. « Si tu te mets à me préparer le petit déj' tout les matins, c'est décidé, je m'installe ! » plaisanté-je.

Même si, dans le fond, ce n'est que la moitié d'une plaisanterie. Je ne me sens pas vraiment prête à retourner chez moi. Pour y retrouver quoi ? Un mari avec qui je ne parviens plus à parler ? D'un autre côté, il faudra bien que j'affronte la situation. Nous ne pourrons pas rester comme ça. Pour le moment, je n'ai pas à y penser. « Tu n'étais pas obligée de faire tout ça pour moi. » ajouté-je avec un peu plus de sérieux. « Tu as déjà fait beaucoup en me laissant dormir ici. »

S'il va forcément falloir que vous ayez une discussion, tous les deux, tu décides en quelques secondes à peine qu'elle attendra, quelques heures, au moins, peut-être plus si c'est nécessaire. La vérité, Jeremiah, c'est que tu ne sais pas quoi penser de tout ça, oui, mais ce qui t'effraies le plus, c'est de ne pas connaître le fond de sa pensée, à elle. Tu peux supposer, évidemment, tu la connais bien, Micah, alors tu peux essayer de deviner mais la vérité ne pourra venir que d'elle…
Tu ranges donc dans un coin de ta tête toutes tes questions et tes suppositions, durant les quelques secondes à peine qu'elle met pour descendre les marches et te rejoindre dans la cuisine. Tu occupes tes mains en disposant le café, les viennoiseries et le jus d'orange correctement sur le comptoir, en sortant le tout des emballages en papier.

Micah apparaît, et ton regard s'égare sur elle un court instant, la robe de chambre de ta sœur traîne un peu sur le vieux lino, Jolene a toujours eu quelques centimètres de plus que ta meilleure amie qui elle, n'est pas bien grande. Ses cheveux sont en bataille. Tu songes un instant que tu ne l'as pas vue ainsi depuis une éternité … Avant, c'était presque monnaie courante, elle dormait à la maison si souvent que c'était presque comme si elle avait intégré ta famille. Jusqu'à le faire pour de vrai, officiellement, et à partir de là, elle n'était plus revenue dormir à la maison.
« Préparer, c'est un bien grand mot, je suis juste allé acheter de quoi manger. » Le frigo est vide, de toute façon, tu n'as jamais été un grand cordon-bleu, c'est vrai, mais ta mère avait toujours pris à cœur que tu saches te débrouiller pour te nourrir. Tu sais au moins réussir une omelette et griller du bacon, le truc, c'est que d'habitude tu es seul ici et que tu préfères de loin aller acheter un truc à manger en sortant avant d'aller bosser. Cuisiner quand on est seul, ça n'a rien de plaisant pour toi. « Bien sûr que si, je suis obligé, à quoi ça sert un ami, si ce n'est à ramener de quoi manger quand ça va mal ? » Tu lui désignes l'un des tabourets du comptoir. « Installe toi, va. » Tu pousses les viennoiseries, ainsi qu'un café et un gobelet de jus de fruits dans sa direction avant de tirer de quoi t'asseoir à ton tour. Tu viens boire une gorgée de ton café, avant de le reposer sous ton nez et tes yeux s'accrochent aux traits de Micah. « Comment tu vas ? Tu as réussi à te reposer, au moins ? »

J'imagine facilement le tableau que je dois offrir. La mine déconfite, le peignoir trop grand. Oui, je dois avoir une sale tronche. Mais s'il y a une personne avec qui je n'ai jamais eu peur de me montrer sous mon plus mauvais jour, c'est Jeremiah. Après tout, il a déjà vu le pire en moi.

Plus que Sullivan, d'ailleurs. Une vérité qui aurait déjà dû me pousser à me poser des questions sur mon mariage. Comment pouvait-il fonctionner si je ne suis pas capable de lui dire quand je ne vais pas bien ? Et puis, pourquoi est-ce que je déteste penser à lui maintenant ? Alors je repousse mon mari au fond de mon esprit. Pour me concentrer sur celui qui est devant moi et qui fait son possible pour prendre soin de moi. « C'est déjà beaucoup d'effort pour quelqu'un qui a décidé de squatter ta maison subitement. » Je sais déjà ce qu'il va me dire : que je ne m'impose pas, qu'il est content de m'accueillir. Que des choses pour que je me sente bien.

Alors que dans le fond, en général, sa présence suffit à ce que j'aille mieux.

Je lui obéis et me glisse face à lui, attrapant le café qu'il fait glisser jusqu'à moi. Je bois une première gorgée alors que je sens son regard sur moi. Je le repose en soupirant. Je hausse les épaules en attrapant un croissant. « Un peu. La nuit a été compliqué. » Je pourrais lui mentir, lui dire que oui, que je suis plus forte que j'en ai l'air. Mais clairement, il sait que c'est faux. Et si je ne suis pas capable de lui montrer à lui ma vulnérabilité, je ne pourrais le faire avec personne.

D'un autre côté, je ne connais personne capable de péter le feu alors que son mariage se trouve au bord du précipice.

Je me demande même si nous ne sommes pas déjà tombé et qu'il est trop tard pour recollé les morceaux. Pour la première fois, cette pensée me soulage presque. Si c'est fini, c'est que les disputes, les attentes et les questions seront fini aussi. Et peut-être que la souffrance aussi finira par disparaitre. « Et puis je me souvenais pas que le lit de Jo était si mou ! On dirait un chamallow. » Je tente un sourire, auquel il ne sera certainement pas dupe, mais, au mois, j'aurais l'impression de retrouver un brin d'énergie.

Tu ne fais pas le moindre commentaire … du moins pour l'instant. Tu te mets à sa place, ou plutôt, tu essaies de le faire, tant bien que mal parce qu'une partie de toi continue de se réjouir un peu de voir que finalement, Sullivan ne pourrait bien être qu'une passade dans la vie de Micah et que tout n'est peut-être pas perdu pour toi. C'est mal, tu le sais, parce qu'elle en souffre et ça se lit sur son visage, dans ses traits tirés et son regard un peu absent.
« C'est un peu ta maison aussi … en quelque sorte. » Elle a passé tellement de temps ici, tellement de journées, tellement de nuits aussi. Elle connaît probablement cette maison autant que tu la connais et ce n'est plus du tout étrange de la voir ici, il y a bien longtemps que tu n'as plus la sensation d'avoir une personne extérieure à la maison quand Micah entre ici. « Et puis, c'est à ça que ça sert les amis. » Et un meilleur ami d'autant plus, mais, ce terme passe mal dans ta bouche depuis un moment.

Tu finis enfin par te détendre un peu, tu t'installes sur l'un des tabourets de la cuisine, pile en face de la brune en soupirant légèrement. Tu te doutais bien qu'elle ne dormirait pas comme un bébé après tout ça, mais il n'empêche que ça t'ennuie de la savoir si mal … et évidemment, la colère que ça provoque se dirige vers son mari. Encore et toujours.
« Ah ça … je l'ai toujours dit mais à l'entendre, c'est moi qui dort sur une dalle de pierre. » Tu te redresses un peu pour profiter de quelques miettes du petit-déjeuner, ton regard va et vient un peu partout dans la maison comme si tu découvrais les lieux, mais tu sais bien que tu essaies surtout de ne pas la regarder avec trop d'insistance. Parfois, ton regard s'arrête tout de même dans sa direction, et tu te demandes ce que tu pourrais bien faire pour que les choses redeviennent plus calmes … Tu veux son bonheur, son bien, son sourire. Tu ne supportes pas de voir Micah si triste, si incertaine, mais tu ne voudrais pas que les choses s'arrangent pour ce mariage. C'est toute la complexité de ta situation.

« Qu'est-ce que tu comptes faire, aujourd'hui ? Tu bosses ? » Malheureusement, la vie n'est pas entre parenthèses malgré tout. Micah à des obligations avec son boulot, même si elle bosse à domicile, et il en est de même pour toi. Tu as ta journée, mais tu seras absent dès demain matin, très tôt. « Tu veux de l'aide pour t'installer ? Tu as tout ce qu'il te faut ? » Si ce n'est pas le cas, tu peux toujours aller récupérer ce qu'il lui manque. « Le volet de la chambre de Jo' ne remonte plus jusqu'en haut, au fait … si tu as besoin de plus de lumière pour bosser, je tenterais de m'en occuper cette après-midi, ça ne doit pas être bien sorcier. »